Le temps des gitans
Amateur de culture et traditions gitanes (voir De sabres et de feu) je n'ai pas hésité un seul instant en voyant le DVD Le temps des gitans de Emir Kusturika parmi les nouveautés de la médiathèque (le film est de 1989 mais le DVD est sorti en 2007).
Si des films comme Gadjo Dilo ou Vengo de Tony Gatlif, ou encore Chat noir chat blanc du même Kusturica, malgré la folie, la violence des passions et les pulsions de vie et de mort qui crèvent l'écran, me paraissent néanmoins lumineux, Le temps des gitans quant à lui m'a paru d'une désespérance totale.
Et ce malgré les envolées oniriques, le fameux réalisme magique de Kusturika et la sublime musique de Goran Bregovic. C'est un film choc que j'ai pris en plein coeur et duquel je n'ai pu me détacher pendant toute sa durée (plus de 2 heures).
Une traversée cauchemardesque de la Yougoslavie des années 80, avant son éclatement, d'un bidonville de Skopje, en Macédoine, jusqu'à un terrain vague de Milan en Italie, à travers la Serbie, le Kosovo, la Bosnie, la Croatie, la Slovénie. Un voyage empli d'obscurité, de pluie et de boue, vers un rêve européen inaccessible pour les gitans.
Je ne vous raconterai pas le film, des sites le font bien mieux que je ne le ferais (voir les liens tout au long du texte). Je me contenterai de vous citer quelques paroles de la première scène, celles d'un fou échappé d'un asile, qui à mon avis résument à elles seules la thématique du film.
Le monologue du fou
Ils veulent détruire ma vie
me décerveler avec leurs seringues.
Mais je me suis enfui.
Je ne suis pas fou.
Me faire boire des potions,
avaler des ampoules, des ampoules !
Attacher mon âme, comme un ours savant !
Attacher mes ailes !
Un esprit sans ailes !
Mon âme est libre
Libre comme un oiseau !
Mon âme plane et redescend
mon âme pleure ou elle rit et chante.
Quand Dieu est descendu sur terre
il a vu les gitans
Et il a pris le vol de retour.
J'y peux rien !
Mon personnage préféré est celui de Khaditza, la grand-mère, dont le rôle est tenu par une femme née à Skopje, comédienne non professionnelle comme la plupart des acteurs du film.
Je vous quitte sur le morceau musical le plus connu de ce film : Ederlezi (le nom rrom de la fête de la Saint-Georges en Serbie)